EXIGEONS LA DIGNITÉ : ENSEMBLE, AGISSONS POUR GARANTIR LE DROIT À LA SANTÉ MATERNELLE AU TOGO

Des relations tendues entre le personnel et les patientes

Le manque d’équipement et de personnel nuit également à la qualité des soins dispensés aux patientes pendant les consultations prénatales et l’accouchement.

‘’Nous sommes débordées, nous ne pouvons pas donner le meilleur de nous-mêmes, cela se répercute sur les patientes, nous ne les accueillons pas correctement et nous pouvons faire des erreurs dans notre travail,’’ 

une sage-femme

Les mauvaises conditions de travail ont aussi un impact négatif sur les relations entre les patientes et le personnel. Plusieurs patientes ont indiqué à Amnesty International qu’elles avaient été agressées verbalement ou humiliées par le personnel.

J’avais des douleurs atroces mais on m’a demandé de descendre de la table car j’étais seulement à 4 cm. Elle m’a renvoyée à la salle de travail. 
J’ai senti que la tête du bébé sortait et j’ai commencé à marcher pour aller vers la salle d’accouchement. Je suis tombée en y retournant alors que la tête sortait. J’avais déjà commencé à accoucher à même le sol. La sage-femme est venue pour m’aider à la fin.
Un médecin est arrivé et a dit que l’enfant n’allait pas bien et nous a orientés vers le service pédiatrique, l’enfant est décédé par la suite », témoigne une patiente qui a perdu son bébé juste après son accouchement.

Francine*

WEZOU : un programme à améliorer

Au cours des dernières années, les autorités togolaises ont pris des initiatives pour rendre plus accessibles les soins de santé maternelle. Le programme Wezou, lancé en 2021, représente une importante avancée car il vise à réduire les taux de mortalité maternelle et néonatale en permettant aux femmes d’avoir accès aux services de santé maternelle à moindres frais. Une dérogation spéciale est accordée aux jeunes filles âgées de moins de 18 ans selon les autorités. Cependant des améliorations sont encore nécessaires.

En amont de son lancement, des sites internet officiels avaient annoncé que le programme Wezou allait « rendre les soins de santé gratuits pour les femmes enceintes ». Mais en pratique, seuls certains services sont gratuits. Par exemple, les antibiotiques qui sont souvent prescrits après l’accouchement ne sont pas couverts par le programme. Aussi, le programme Wezou est conçu pour l’échelon sanitaire périphérique c’est-à-dire les centres médico-sociaux (CMS). Il n’est pas effectif au centre hospitalier universitaire Sylvanus Olympio (CHU SO) ce qui constitue également un frein à l’effectivité de la prise en charge pour les couches les plus vulnérables—y compris les patientes mineures qui ont besoin de l’accord du service en charge du programme afin d’être enrôlées.

‘’J’ai été enrôlée dans Wezou quand je faisais les consultations prénatales au centre médico-social (CMS). On faisait l’analyse gratuitement et on nous donnait quelques comprimés. J’avais compris que l’accouchement aussi devait être gratuit. 
Mais pour l’accouchement, ils ont dit que Wezou ne marche pas au CHU donc nous avons tout payé. 
C’est déjà bien que le gouvernement prenne en charge le bilan de grossesse. Mais c’est au CHU que beaucoup de personnes viennent donc si on veut vraiment aider les gens, Wezou doit être effectif ici.’’

Une patiente

Selon les lignes directrices de l’OMS, il est important de promouvoir des « soins de maternité respectueux », c’est-à-dire des soins qui sont fournis avec humanisme de façon à préserver la dignité des femmes {…}, à garantir leur protection contre la souffrance et les mauvais traitements ». 

Cependant, malgré les efforts consentis par le gouvernement togolais pour réduire les taux de mortalité maternelle et néonatale, les femmes enceintes sont toujours vulnérables face à une mauvaise prise en charge ; le personnel de santé reste indexé même si pour eux aussi les conditions de travail sont difficiles. 

Agissez maintenant

demandez aux autorités togolaises de rendre plus effectif le programme Wezou pour une meilleure prise en charge des femmes enceintes.

Manque de personnel et équipement médical inadéquat : un fléau persistant malgré les efforts des autorités

En 2024, le gouvernement togolais a procédé au recrutement de 193 Sages femmes, 177 accoucheuses réparties dans les hôpitaux et centres de santé du pays sur un effectif de 1500 agents, dont des sages femmes, qui était annoncé par le ministre de la Santé. Huit gynécologues obstétriciens ont été également recrutés mais n’ont pas encore été affectés aux différentes formations sanitaires.

En 2024, un important lot de matériel a aussi été mis à la disposition des structures sanitaires pour renforcer leurs capacités de prise en charge.

Cependant, ces efforts notables restent insuffisants face à la situation constatée dans les services de maternité qui ont été visités par les délégués d’Amnesty International.

« Les gynécologues sont souvent épuisés. Nous sommes à la fois en consultation, au bloc, sur des accouchements compliqués… Pour cette raison, les gynécologues sont rares dans le public. Ils vont dans le privé pour percevoir des revenus à hauteur de l’énergie investie. Dans certains centres, il y a des blocs [opératoires] mais pas de gynécologues. » Une gynécologue.

ENVOYEZ CE MESSAGE AU MINISTÈRE DE LA SANTÉ, DE L’HYGIÈNE PUBLIQUE

@MSPS_Togo L’État doit améliorer les conditions des travailleurs dans les services de santé maternelle. Agissez maintenant en dotant les infrastructures de santé de personnel suffisant et formé, et en matériel adéquat.

Tous les services de maternité visités manquaient de personnel suffisant mais également d’équipements de base nécessaires pour recevoir les patientes et assurer les soins. Dans un des centres médico-sociaux (CMS) de Lomé, la délégation d’Amnesty International a constaté que les tables d’examen étaient en piteux état dans la salle de consultation anténatale, et en raison du manque de lampes scialytiques, les sages-femmes devaient utiliser la torche de leur téléphone portable pendant les consultations.

Il faut que les autorités fassent quelque chose. Pour faire la lessive des effets personnels, il faut payer 250 francs CFA ; il faut payer 50 francs pour avoir environ 2 litres d’eau chaude pour les soins du bébé. Même pour uriner dans les toilettes de l’hôpital, il faut payer

Une patiente venant d’accoucher.

J’avais des douleurs atroces mais on m’a demandé de descendre de la table car j’étais seulement à 4 cm. Elle m’a renvoyée à la salle de travail. 
J’ai senti que la tête du bébé sortait et j’ai commencé à marcher pour aller vers la salle d’accouchement. Je suis tombée en y retournant alors que la tête sortait. J’avais déjà commencé à accoucher à même le sol. La sage-femme est venue pour m’aider à la fin.
Un médecin est arrivé et a dit que l’enfant n’allait pas bien et nous a orientés vers le service pédiatrique, l’enfant est décédé par la suite », témoigne une patiente qui a perdu son bébé juste après son accouchement.

Francine*


Les autorités togolaises doivent mettre le personnel dans les meilleures conditions pour améliorer leurs performances et mettre fin aux mauvais traitements notamment la violence verbale dans les services de santé maternelle.